STANDARD Dans toutes ses composantes, le club principautaire part à la dérive
ANALYSE
Le Standard est un bateau qui part à la dérive. Quoi de plus normal quand aucun capitaine reconnu comme tel n’est à bord. Certes, le club a un président à sa tête. Le très peu charismatique Roland Duchâtelet. Au moment de sa prise de parole dans le vestiaire lors de la reprise des entraînements cet été, des joueurs se demandaient qui parlait ! Aujourd’hui, seize mois après la reprise d’un club qu’il a racheté 32 millions le 23 juin 2011, et alors que sont de plus en plus nombreux ceux se demandant ce qu’il est réellement venu faire à Sclessin, l’homme d’affaires doit faire face à un bilan catastrophique. Et sans un changement radical dans sa manière de gérer un club sans commune mesure avec celui de Saint-Trond, auquel il fait parfois référence à Sclessin (!) et dont il était précédemment président, les choses risquent de ne pas s’améliorer.
Sportivement, le club principautaire a raté une qualification européenne au terme des playoffs complètement loupés lors du dernier championnat. Soit, cela devait être douze mois de transition. Cette saison, les Rouches occupent une peu enviable douzième place avec 13 points sur 33. On pourra toujours dire que Roland Duchâtelet n’est pas responsable du sportif. Sauf qu’il a choisi José Riga, Ron Jans (et il cherche à engager un troisième coach en… 16 mois !) et même l’un ou l’autre transfert passé ou… à venir.
Mais le rôle d’un président s’entend évidemment au-delà de la sphère sportive, dans une gestion plus générale du club. L’un de ses objectifs en arrivant au Standard était de réduire la masse salariale. Sa méthode ? Offrir à un coach sans palmarès le plus gros salaire qu’un entraîneur n’ait jamais eu en Cité ardente et donner des contrats à ses transferts plus élevés que ceux signés sous l’ère D’Onofrio, histoire d’installer un schisme financier entre anciens et nouveaux. Qui plus est, en 16 mois, si 23 joueurs ont quitté Sclessin (dont Belhocine et Gakpé amenés sous sa direction), 40 y sont arrivés ! Oui, 40 en 16 mois ! Neuf sont toutefois prêtés en Belgique ou à l’étranger car, dorénavant, le Standard achète aussi des joueurs pour renforcer les clubs amis du président comme Ujpest, actuellement 12e du championnat hongrois, avec Zairi ou Saint-Trond, 9e en D2 avec Bulos. Et ce même si Roland Duchâtelet prétend ne pas avoir mis un centime dans Saint-Trond (le stade appartient officiellement à sa compagne), Ujpest (dont le président est son fils Roderick), voire Sittard.
Certains se sont offusqués que l’ancien directeur général du Standard, Pierre François, répète avant le match contre Anderlecht ce que tout le monde constate : « Le Standard a perdu son âme. » Pourquoi oublier que Duchâtelet a dit « contre Anderlecht, ce sera la guerre » ? Et il a été servi, s’étonnant même, par une méconnaissance évidente de la culture du club, d’une contestation « plus forte » que celle à laquelle il s’attendait. Car Duchâtelet, qui verse plus vite une larme sur la descente de Saint-Trond que sur le sort du Standard, maîtrise parfaitement l’art des phrases qui font rire un peu à l’insu de son plein gré. « Ron Jans est l’un des meilleurs entraîneurs d’Europe, on va faire une saison du tonnerre, le Standard doit jouer la Ligue des champions tous les dix ans, un joueur qui simule doit être suspendu un an, Bjarnason a été plus rentable que Witsel » sont déjà des collectors. Heureusement, il les distille avec parcimonie.
Si Duchâtelet, réputé pour ses changements d’avis aussi vifs que l’éclair (je prends Reza, je ne le prends plus, je le prends en janvier) a réussi dans les affaires, on peut dire que c’est loin d’être le cas en foot. Un sport dont il connaît l’histoire à l’image de son premier et très long discours dont se souviennent encore ceux qui ont participé au premier business meeting sous sa présidence, mais pas sa pratique. Pourtant, en faisant le vide autour de lui, il agit à la Bayat comme s’il voulait tout gérer lui-même ! Imaginerait-on que Vanden Stock se débarrasse de Van Holsbeeck et de Collin pour diriger Anderlecht en n’y mettant les pieds qu’une ou deux fois par semaine ! Impensable. Pourtant, depuis le limogeage de Pierre François, les joueurs n’ont plus d’interlocuteur privilégié et plus personne ne gère le club au quotidien. Ou plutôt, un groupe de personne le fait au point qu’au bout du compte, les responsabilités sont tellement diluées que l’efficacité fait autant défaut qu’aux attaquants des Rouches.
A titre d’exemple, comment est-il possible d’envoyer le team manager défendre la cause du club dans un dossier aussi important que celui des fumigènes dont on savait que le club risquait un match à huis clos ?
En attendant, la communication interne se fait désormais par mails puisque le président a d’autres occupations qui l’empêchent même de représenter son club lors des matchs européens. L’an dernier, il a participé à trois déplacements continentaux sur les sept effectués par le Standard. En revanche, quand il s’agit de suivre le Standard Femina, il répond présent quitte à mécontenter les autorités communales de la ville de Liège qui, le même jour, présentait officiellement l’équipe. C’est vrai, nous avions oublié que la Belgique est le pays du surréalisme.
Ce vendredi, dans une ambiance qui s’annonce hostile (des supporters en noir qui n’encourageraient pas leur équipe), le Standard doit amorcer sa remontée. Avec Balette à la barre. Après, un nouveau coach (qui ne sera pas Domingos comme certains l’ont évoqué jeudi) devra prendre le relais. Duchâtelet doit poser un geste fort : engager quelqu’un d’expérience avec un palmarès. Mais peut-il accepter de prendre dans la liste de la cinquantaine de CV reçus à Sclessin, un entraîneur qui ne se laissera pas marcher sur les pieds ? C’est bien toute la question…
Les joueurs du Standard s’opposent à leur direction : « Merci Ron »
source archives lesoir.be
Mar 30 Oct - 3:00